Retrait des rapports d’audits provisoires à la section des comptes de la cour supprême : Les Présidents des anciens partis politiques dissous entre persécution et abus

Un adage malien ne dit-il pas qu’à force de jeter la grenouille on finira par être son sauveur en la propulsant dans son environnement naturel ? Cet adage sied bien aux partis politiques maliens dissous et inexistants depuis belle lurette et auxquels on demande des comptes.

En effet, les Présidents des anciens partis politiques dissous au Mali ont été invités par la section des Comptes de la Cour Suprême à retirer les extraits de rapports d’Audit provisoires pour la période allant de 2000 à 2020 et cela avant le 6 novembre 2025. Selon nos informations aucun Président de parti politique dissous n’a répondu présent pour enlever son rapport d’audit provisoire, comme pour dire que cet acte des autorités de la transition via la section des comptes de la Cour Suprême s’apparente à de la persécution voir un abus de pouvoir car ces partis n’existent ni sur papier encore moins physiquement, en se réfèrent aux termes contenus dans le décret de leur dissolution. La justice, cette autre tare de notre société, va-t-elle se ressaisir pour dire le droit et être l’étincelle qui éclairera le peuple dans cette rocambolesque affaire de dissolution des partis politiques ? Les autorités de la transition n’ont –elles pas toujours tiré des enseignements de cette gravissime crise pour rassembler au lieu de diviser ?
Il est impensable d’imaginer cet acte à la fois ubuesque et humiliant de la part des autorités à l’encontre des Présidents des anciens partis dissous, celui de leur demander des comptes à un moment difficile de l’existence de notre nation. Il est d’autant plus étonnant que c’est au moment où tout le monde fuit le Mali que les autorités continuent à diviser les maliens. Il ressort du constat de nombreux observateurs de la scène politique malienne que la dissolution des partis politiques a été une grosse bourde et qu’elle n’a nullement contribué à apaiser le climat sociopolitique. En effet, cette énième erreur de la part des autorités ne serait pas sans conséquence sur le climat sociopolitique et sur l’union sacrée tant recherchée, surtout pendant ce temps de turpitudes que le Mali traverse et qu’il continue d’ailleurs de subir. Nombreux étaient les observateurs qui pensaient que les autorités, tirant les leçons de leurs échecs, allaient descendre de leur piédestal pour rassembler les maliens afin d’amorcer une véritable réconciliation et du coup constituer un front unifié contre les forces du mal. Il n’en est malheureusement rien, elles continuent à gouverner dans la peur, l’oppression, la division et l’exclusion totale de certains acteurs pas des moindres. La justice, dernier rempart du peuple semble suivre l’exécutif au détriment du droit et du peuple. N’est-il pas temps avant qu’il ne soit trop tard de se ressaisir ? Le peuple a une soif véritable de justice, cette dernière, malheureusement, tarde à assumer cette sacerdotale mission.
La justice, cette autre tare de notre société, va-t-elle se ressaisir pour dire le droit et être l’étincelle qui éclairera le peuple dans cette rocambolesque affaire de dissolution des partis politiques ?
Dans une société, la bonne distribution de la justice est à la fois la boussole indiquant le bon fonctionnement de cette société, mais aussi et surtout le premier indicateur du respect des valeurs et lois de la République. Aucun pays ne pourra se développer si sa justice est de mauvaise qualité. Ce à quoi nous assistons au Mali se passe de tout commentaire tant la justice est tout sauf ce que le peuple attend d’elle, à savoir être son dernier rempart contre l’oppression, l’injustice. Sa soif d’une justice juste et équitablement répartie est loin d’être assouvie. Pour rappel le gouvernement de transition a pris un décret pour dissoudre les partis politiques et les associations à caractère politique en toute illégalité et en violation flagrante de la Constitution de 2023, adoptée sous la transition. Malgré cet abus les militants et cadres des partis politiques se sont conformés à cette décision. Quelques mois seulement après cette décision la justice se lance aux trousses des Présidents des partis dissous leur demandant de fournir les pièces comptables des fonds perçus pendant une période allant de 2000 à 2020. Cette injonction est venue de la section des Comptes de la Cour Suprême, soit la juridiction suprême. Les présidents des partis politiques dissous ont opposé une fin de non-recevoir à cette demande alléguant leur inexistence après le coup de massue donné par le Gouvernement, donc c’est un non catégorique qui a été opposé à cette demande de comptes adressée aux Présidents des partis politiques. Comme si cela ne suffisait pas la section des comptes de la Cour Suprême leur a adressé une invitation à venir retirer les rapports d’audit provisoires de la période 2000 à 2020 et cela avant le 6 novembre 2025. Là encore c’est le silence radio dans les états-majors des ex partis politiques. La question que l’on est en droit de se poser est celle de savoir si la Cour Suprême rend service au peuple ou à l’élite qui gouverne ? La justice doit pourtant être rendue au nom du peuple tout en préservant la paix et la quiétude. Cette décision impopulaire creuse davantage le fossé déjà abyssal de la société malienne et pourrait susciter des remous sociopolitiques aux conséquences dramatiques.
Les autorités de la transition n’ont –elles pas toujours tiré des enseignements de cette gravissime crise pour rassembler au lieu de diviser ?
Il est inimaginable que des autorités réellement conscientes du danger qui guette notre patrie, puisse continuer à attiser le feu et à diviser la société malienne. Cette chasse aux sorcières enclenchée contre les partis politiques et leurs leaders est une décision de mauvais aloi et ne contribue nullement à apaiser le climat sociopolitique déjà délétère. Aujourd’hui plus que jamais le Mali a besoin d’unité nationale, de rassemblement et de cohésion sociale, ces vertus sont indispensables pour faire face au péril djihadiste. En effet, si les autorités ne sont pas censées comprendre ce message, il revient à la justice de s’assumer et de dire le droit. C’est à ce prix qu’elle deviendra le dernier rempart du peuple et surtout à un moment crucial de la vie de la nation. La justice doit sauver ce pays qui est sur le point de s’effondrer. En tout cas si tant est qu’elle mesure la gravité de la situation elle doit purement et simplement annuler cette décision de dissolution des partis politiques. Une autre question doit certainement préoccuper les maliens c’est le rôle joué par les Conseillers techniques du Président de la transition. En tout cas si tant est qu’ils ont été choisis « Es qualité », autrement dit en fonction de leurs expertises dans leurs domaines respectifs, ils auraient alors failli dans leur mission, car le dernier de la classe devrait pouvoir dissuader ou persuader le Président qu’une telle décision, celle de dissoudre les partis politiques, était lourde des conséquences. Cette décision, tout comme d’autres, est mauvaise et ne contribue pas à un large rassemblement des maliens. A-t-on besoin de rappeler qu’une transition par définition est une courte période pendant laquelle on fait des grandes réformes, dans un large consensus sans opposition véritable, afin de jeter les bases d’une solide fondation d’un pays ? Elle ne doit nullement pas être une période d’exclusion, de répression, de confiscation des droits et libertés, encore moins d’accaparement du pouvoir. Elle doit juste baliser le terrain pour un retour à l’ordre constitutionnel.
En somme, les autorités doivent mettre balle à terre, apaiser le climat sociopolitique afin de faire face au péril djihadiste. Un basculement du Mali en Etat purement islamique n’est à l’avantage de personne, à commencer par les autorités qui risquent de payer le prix fort !
Youssouf Sissoko

Source : L’Alternance

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